L’une des raisons majeures pour lesquelles il est crucial de ne pas voter cette nouvelle constitution gabonaise réside dans l’encadrement minimal de la protection environnementale. Alors que le monde entier prend conscience des enjeux environnementaux, du changement climatique et de la biodiversité, cette constitution semble se limiter à des principes vagues, insuffisants pour répondre aux défis actuels. L’article 37 de la constitution prévoit que l’État doit œuvrer pour la protection de l’environnement, mais cela reste bien trop flou et dépourvu de mécanismes réels de mise en œuvre.
1. Un Engagement Trop Faible et Non Contraignant
L’article 37 stipule que l’État doit œuvrer pour la protection de l’environnement. Bien que cette disposition semble annoncer une prise de conscience de la part du législateur, elle reste à un niveau général qui manque d’ambition et de concret. En effet, cette déclaration est insuffisante face aux enjeux environnementaux urgents qui nécessitent des engagements fermes et des actions précises. Dans un contexte où la déforestation, la pollution de l’eau et de l’air, ainsi que l’épuisement des ressources naturelles sont des menaces de plus en plus pressantes, cette formulation laisse l’impression que la protection de l’environnement est reléguée au second plan.
Le problème majeur réside dans l’absence d’une véritable obligation de résultat. La constitution ne prévoit aucun mécanisme de contrôle, de sanction ou de responsabilisation de l’État pour ses actions en matière de préservation de l’environnement. Une telle lacune rend la protection environnementale dépendante de la bonne volonté des autorités en place, sans obligation légale d’agir, ce qui est un sérieux défaut dans un cadre constitutionnel.
2. Absence de Droit Fondamental à un Environnement Sain
L’un des principes clefs d’une gouvernance environnementale moderne et responsable est d’assurer à tous les citoyens un droit fondamental à un environnement sain. Beaucoup de pays ont intégré ce principe dans leurs constitutions, en reconnaissant que la qualité de l’environnement est essentielle pour le bien-être humain. Malheureusement, la constitution gabonaise ne fait pas mention d’un tel droit fondamental. Au lieu de cela, l’environnement est traité comme une question secondaire, subordonnée à d’autres priorités politiques.
La protection de l’environnement ne peut être effective si elle n’est pas ancrée dans les droits fondamentaux des citoyens. Un cadre constitutionnel solide devrait garantir aux Gabonais un environnement libre de pollution, garantissant ainsi leur santé et leur sécurité. Sans cette base, les actions concrètes pour protéger la biodiversité et lutter contre les effets du changement climatique seront reléguées au second plan par rapport à des considérations économiques et politiques.
3. Absence de Politiques Claires et Ambitieuses pour la Biodiversité
Le Gabon est un pays exceptionnellement riche en biodiversité, abritant des écosystèmes uniques et précieux. Pourtant, la constitution ne semble pas intégrer pleinement la nécessité de politiques ambitieuses en matière de conservation de la nature. La gestion durable des ressources naturelles, la préservation des forêts tropicales, la protection des espèces en danger ou encore l’engagement contre le braconnage ne sont que peu ou mal abordés dans le texte constitutionnel.
Une vraie constitution verte devrait obliger l’État à adopter des politiques spécifiques, mesurables et à long terme pour préserver ces richesses naturelles. La protection de l’environnement doit inclure des mesures concrètes, telles que des zones protégées, des lois anti-pollution rigoureuses, et des incitations pour les entreprises à adopter des pratiques durables. En l’état, la constitution ne propose qu’un cadre vague qui ne pourra pas garantir une politique environnementale ambitieuse.
4. Absence d’Engagement Concret pour la Lutte contre le Changement Climatique
L’absence d’une stratégie nationale claire pour la lutte contre le changement climatique dans cette constitution est une autre raison de s’opposer à sa validation. Alors que le Gabon est un petit contributeur aux émissions mondiales de gaz à effet de serre, il est crucial que le pays joue un rôle de leader en Afrique centrale en matière de lutte contre le changement climatique. Cela nécessiterait des engagements concrets, comme la réduction des émissions, la promotion des énergies renouvelables, la protection des zones maritimes et forestières, ainsi que des investissements dans les infrastructures vertes.
La constitution actuelle ne prévoit aucun cadre formel pour la mise en œuvre des engagements climatiques pris lors des accords internationaux tels que l’Accord de Paris. Ce manque d’engagement national représente une véritable opportunité manquée de positionner le Gabon comme un acteur fort et responsable dans la lutte pour un avenir climatique durable.
5. Le Rôle de la Société Civile Éclipsé
Un autre point critique est le rôle marginalisé de la société civile dans la gestion environnementale. Alors que de nombreux pays intègrent des mécanismes pour impliquer les citoyens, les organisations environnementales et les entreprises dans les processus de décision, cette constitution ne prévoit aucune disposition permettant une véritable participation démocratique de ces acteurs dans les décisions liées à l’environnement. La consultation publique et la transparence sont des éléments fondamentaux pour la mise en œuvre d’une politique environnementale durable.
L’absence de ces mécanismes de gouvernance inclusive et participative constitue une faiblesse majeure, car la protection de l’environnement nécessite une collaboration à tous les niveaux. La société civile doit pouvoir jouer un rôle essentiel en matière de surveillance des actions gouvernementales, de plaidoyer pour une meilleure gestion des ressources naturelles, et d’implication dans les décisions publiques.
Un Manque d’Ambition pour l’Avenir
En l’état, la nouvelle constitution gabonaise ne répond pas aux enjeux environnementaux pressants du pays. Elle offre une protection trop faible et trop vague de l’environnement, ne garantit pas de politiques publiques ambitieuses pour la biodiversité et le changement climatique, et omet de considérer la protection de l’environnement comme un droit fondamental des citoyens. Le Gabon mérite une constitution qui intègre la question environnementale de manière sérieuse et engage l’État à prendre des mesures concrètes pour préserver ses écosystèmes pour les générations futures.